Ken LeVasseur décrit plus en détails la célèbre expérience de Bastian :                                                         
"Cette expérience n'a pas donné tous les résultats escomptés, dit-il, principalement pour les raisons suivantes : 

1.Mauvaise qualité du transfert auditif (l'hydrophone ne laissait passer d'une piscine à l'autre qu'un nombre limité de fréquences sonores). 

2. Age trop précoce des sujets d'expérience : capturés à deux ans, les delphineaux n'ont pas eu le temps matériel d'apprendre leur propre langue ! 

3. Intensité du stress, directement proportionnel à l'âge précoce des sujets".

 

 

De ce fait, l'expérience fut tentée une dernière fois dans les années 90, par une équipe de chercheurs russes.

Menée sur deux delphines adultes, Jenny et Kora, cette étude visait à refaire l'expérience américaine dans des conditions scientifiquement plus strictes mais similaires au niveau du protocole d'ensemble.Elle a conduit à des conclusions nettement plus complètes et troublantes que le celles du test de Bastian. 
"Nos résultats, affirment en effet les auteurs, démontrent clairement que les dauphins peuvent se transmettre de manière exclusivement acoustique des informations abstraites du type : taille (grand/petit) ou localisation (gauche/droite) et agir de cette manière sur le comportement l'un de l'autre." 

 

Dans ce cas, c'est le langage "naturel" des dauphins qui a été analysé et tout particulièrement la structures syntaxiques de leurs messages sonores et les éléments de leur vocabulaire. 2O dauphins adultes ont été capturés pour l'occasion parmi lesquelles 7 mâles, 13 femelles et trois nouveaux-nés. 
Enregistrés soit dans des enclos en mer, soit dans es bassins, ces individus communiquaient entre eux directement ou via un canal électro-acoustique, lorsqu'ils étaient isolés. Le total des sons enregistrés sur bande magnétiques s'élevaient à plus de 300 000. 

Partant de l'observation courante que les dauphins semblent se concerter et communiquer entre eux lorsqu'ils mènent leurs chasses collectives, V. Markov s'est appliqué à comprendre les structures de cette communication. Ce qu'il a découvert au terme de son étude est proprement stupéfiant : 
Les dauphins s'échangent en effet des informations par le moyen d'un large ensemble de signaux acoustiques organisés en structures complexes et comparables aux structures du parler humain. 
On sait qu'une langue se fonde d'abord sur un ensemble d'éléments simples, qui sont les phonèmes de base. Ces phonèmes se combinent ensuite en syllabes - c'est le deuxième niveau - puis en mots et enfin en phrases. 

Si un langage dispose de ces trois ou quatre niveaux, il peut fournir à peu près toutes les informations possibles et s'enrichir de nouveaux mots. C'est ce qu'on appelle un " système ouvert". La plupart des scientifiques estiment que seul parmi tous les autres êtres vivants, l'être humain dispose d'un tel système de communication, désigné sous le terme de " langage ".
Pourtant, les recherches menées par V.I. Markov montrent à l'évidence que les dauphins Tursiops Truncatus Ponticus vivant en Mer Noire - et sans doute nombre d'autres cétacés - possèdent bien un tel système de communication. 

V. Markov nous apprend notamment que, de la même manière que les Humains utilisent une quarantaine de phonèmes de base - majoritairement des consonnes pour un nombre moindre de voyelles - les dauphins disposent d'une sorte d'alphabet, constitué de 51 sons pulsés - les clicks - et d'au moins 9 sifflements de nature tonale. 

En outre, les signaux d'un certain type peuvent être modifiés au début ou à la fin, le cœur du signal restant constant, de la même manière que nous pouvons associer un préfixe ou un suffixe à une racine verbale donnée. 
Mieux encore, des régularités statistiques, longuement étudiées dans la seconde partie du texte de Markov, permettent d'affirmer que les séries de sons complexes émises par les dauphins constituent bien du "texte", susceptible de véhiculer tout un ensemble d'informations. 

 

 

 

L'alphabet dauphin de base : sons purs et sons cliqués

 

En conclusion de son étude, Markov n'hésite donc pas à affirmer :  

"Sur base de l'ensemble de nos recherches, nous pouvons conclure aujourd'hui que les dauphins Tursiops disposent d'un système de communication de type ouvert. Outillés d'organes phonatoires d'un extrême flexibilité, ils peuvent en outre se livrer à des combinaisons sonores à de multiples niveaux et se construire de la sorte un vocabulaire virtuellement illimité, un ensemble de signaux acoustiques formant eux-mêmes une multitude de messages organisés comme des textes à partir de ces unités de base (que sont les blocs structuraux). Un tel degré de complexité semble unique et le système de communication des dauphins semble ne trouver aucun équivalent dans aucune autre espèce animale existante"

 

 

 

Copyright © Thoun-Thava, TS7, Lycée Kléber 2004